La fin et l'après-guerre
L’offensive ultime, coordonnée par le maréchal Foch, vit pour la première fois l’engagement de toutes les forces belges au côté des Alliés. En effet, jusque-là le roi Albert avait toujours refusé à la fois de quitter le territoire national et de participer aux offensives Alliées. Cette attitude inébranlable épargna à l’armée belge les hécatombes de la Somme et de Verdun. Le roi Albert se méfiait des Alliés qu’il ne considérait que comme ses garants et ceux-ci le lui rendaient bien : Lloyd George, particulièrement, ne cachait pas son mépris pour les Belges qui n’avaient perdu qu’ environ 50 000 soldats. Le roi se méfiait aussi de ses ministres résidant au Havre qu’il consultait peu, voire pas du tout. En septembre 1918, le roi accepte, sans en parler au gouvernement, de prendre la tête de l’Armée des Flandres et d’avoir comme chef d’Etat-major le général français Degoutte. L’offensive en direction de Bruxelles commence le 28 septembre. L’armée des Flandres passe l’Yser, atteint Roulers, puis Ostende, Bruges et Gand. L’armée belge paya un lourd tribut à ces derniers combats pour la victoire : 253 officiers et 3083 sous-officiers et soldats perdent la vie et 26 000 autres sont blessés.
Le roi, son armée et les troupes alliées entrent dans ces villes sous les ovations de la foule. On parlera des “ joyeuses rentrées ” du roi dans ses chefs-lieux de provinces délivrés. L’apothéose sera la joyeuse entrée du roi à Bruxelles, le 22 novembre 1918. Les joyeuses entrées des souverains font partie d’une tradition pluriséculaire, reprise par la monarchie constitutionnelle belge dès 1831 et toujours en vigueur aujourd’hui. Le jeune roi Albert, dès son avènement en décembre 1909, avait commencé ses joyeuses entrées dans les différents chefs-lieux de province. Avant la guerre déjà, la présence du roi suscite un univers particulier où la société, oubliant ses dissensions, s’exalte elle-même à travers la figure royale. En 1918, c’est bien cette même tradition que l’on retrouve, mais renouvelée, approfondie, chargée des quatre années de guerre : à la légèreté insouciante des joyeuses entrées se substitue une joie plus grave et plus complexe…
Le roi, son armée et les troupes alliées entrent dans ces villes sous les ovations de la foule. On parlera des “ joyeuses rentrées ” du roi dans ses chefs-lieux de provinces délivrés. L’apothéose sera la joyeuse entrée du roi à Bruxelles, le 22 novembre 1918. Les joyeuses entrées des souverains font partie d’une tradition pluriséculaire, reprise par la monarchie constitutionnelle belge dès 1831 et toujours en vigueur aujourd’hui. Le jeune roi Albert, dès son avènement en décembre 1909, avait commencé ses joyeuses entrées dans les différents chefs-lieux de province. Avant la guerre déjà, la présence du roi suscite un univers particulier où la société, oubliant ses dissensions, s’exalte elle-même à travers la figure royale. En 1918, c’est bien cette même tradition que l’on retrouve, mais renouvelée, approfondie, chargée des quatre années de guerre : à la légèreté insouciante des joyeuses entrées se substitue une joie plus grave et plus complexe…
Le suffrage universel
Avant d’arriver à Bruxelles, le 11 novembre, le roi s’arrête au château de Lophem non loin de Bruges. Il reçoit une délégation du Comité national de Secours et d’Alimentation pour s’informer de la situation en Belgique occupée, ainsi que des représentants des partis catholique, libéral et socialiste. On apprend que des soldats allemands se sont révoltés contre leurs supérieurs et qu’un drapeau rouge flotte sur le Palais de la Nation. Mais le risque de voir les Belges participer à une révolution n’est pas réel. Partout les Allemands battent en retraite tout en pillant ce qu’il y a encore moyen de piller. Lors des discussions de Lophem, le roi se convainc de la nécessité d’accorder le suffrage universel aux hommes de 21 ans, ainsi qu’aux veuves de guerre, immédiatement, c’est-à-dire sans passer par la procédure lente dictée par la Constitution. En effet, seul l’octroi immédiat du droit de suffrage semblait pouvoir aider à supporter les souffrances de la guerre et celles de la reconstruction. Il négocia donc la formation d’un gouvernement tripartite qui mettrait cette réforme à son programme et l’annonça dans son Discours du Trône, le 22 novembre. La loi fut votée sans grande difficulté.
Dès novembre 1919, les élections diminuèrent le nombre de sièges catholiques et libéraux et donnèrent aux socialistes plus d’un tiers des sièges. On avait violé le droit pour rentrer dans la légalité. Grâce à cela, la Belgique allait éviter, au sortir de la guerre, les troubles sociaux qui éclatèrent chez la plupart de ses voisins. Un autre problème qui se posait à l’époque était l’université flamande. La question linguistique s’était fortement envenimée au cours de la guerre, suscitant activisme et frontisme. Les activistes avaient été condamnés pour collaboration avec l’ennemi. Toutefois, le roi et d’autres se rendaient compte qu’il fallait donner satisfaction aux légitimes revendications flamandes : dans son Discours du Trône, il promet la création d’une université flamande à Gand. Mais l’atmosphère du pays n’était pas favorable : au Parlement, l’élite flamande était encore largement francophone et dans l’opinion publique l’université flamande de Gand était associée à “ l’université von Bissing ” et à la Flamenpolitik. Dès lors on vota quelques lois insuffisantes. Il fallut attendre 1930 pour voir la promesse du roi se réaliser. Entre-temps la querelle linguistique s’était approfondie : les francophones confondaient patriotisme et langue française, colportaient des épithètes tels que “ flamboche ” et “ université von Bissing ” ; ce qui eut pour résultat de faire passer, aux yeux des Flamands, les activistes pour des martyrs de la cause flamande.
Ainsi, le pays était libéré. La guerre était finie. La Belgique avait abandonné sa neutralité. Les exilés rentraient au pays sans fanfare. Les soldats couverts de gloire retrouvaient leur famille, les déportés aussi. Les morts faisaient sentir leur absence. Le pays ruiné était confronté au problème de la reconstruction (et par là même à celui des réparations) et le pays en deuil, aux enjeux de mémoire.
Voir également 16 décembre 1919: le suffrage universel
Dès novembre 1919, les élections diminuèrent le nombre de sièges catholiques et libéraux et donnèrent aux socialistes plus d’un tiers des sièges. On avait violé le droit pour rentrer dans la légalité. Grâce à cela, la Belgique allait éviter, au sortir de la guerre, les troubles sociaux qui éclatèrent chez la plupart de ses voisins. Un autre problème qui se posait à l’époque était l’université flamande. La question linguistique s’était fortement envenimée au cours de la guerre, suscitant activisme et frontisme. Les activistes avaient été condamnés pour collaboration avec l’ennemi. Toutefois, le roi et d’autres se rendaient compte qu’il fallait donner satisfaction aux légitimes revendications flamandes : dans son Discours du Trône, il promet la création d’une université flamande à Gand. Mais l’atmosphère du pays n’était pas favorable : au Parlement, l’élite flamande était encore largement francophone et dans l’opinion publique l’université flamande de Gand était associée à “ l’université von Bissing ” et à la Flamenpolitik. Dès lors on vota quelques lois insuffisantes. Il fallut attendre 1930 pour voir la promesse du roi se réaliser. Entre-temps la querelle linguistique s’était approfondie : les francophones confondaient patriotisme et langue française, colportaient des épithètes tels que “ flamboche ” et “ université von Bissing ” ; ce qui eut pour résultat de faire passer, aux yeux des Flamands, les activistes pour des martyrs de la cause flamande.
Ainsi, le pays était libéré. La guerre était finie. La Belgique avait abandonné sa neutralité. Les exilés rentraient au pays sans fanfare. Les soldats couverts de gloire retrouvaient leur famille, les déportés aussi. Les morts faisaient sentir leur absence. Le pays ruiné était confronté au problème de la reconstruction (et par là même à celui des réparations) et le pays en deuil, aux enjeux de mémoire.
Voir également 16 décembre 1919: le suffrage universel
Versailles
Au traité de Versailles, malgré certains remous, la Belgique obtient quelques gains territoriaux (l’annexion des cantons de l’Est et un mandat sur le Ruanda-Urundi), mais surtout une priorité de 2 milliards de Marks-or et un siège permanent à la Commission des Réparations. Pourtant, les Belges auront très vite le sentiment d’avoir perdu la paix, d’être abandonnés, voire méprisés, par les Alliés. Il est vrai que la délégation belge dut se battre pour préserver sa fameuse priorité et sut profiter des dissensions entre la France et la Grande-Bretagne pour y parvenir. Mais l’opinion publique belge gardera l’impression que les droits des petits peuples, même glorieux et martyrs comme la Belgique, sont toujours bafoués par l’égoïsme des grandes puissances. La presse belge nationale de 1919, toutes tendances confondues, témoigne d’abord de l’indignation du pays qui, après avoir été couvert de lauriers, se sent mal mené par le Conseil des Quatre. Mais, en quelques jours, l’indignation fait place à la déception, puis à l’amertume et enfin au silence. La façon dont la Belgique se ressent est tout à fait caractéristique : de “ Nation-Martyre de la Barbarie teutonne ”, elle devient la Victime des appétits alliés. Cette victimisation marque, d’ailleurs, toute la mémoire belge de l’entre-deux-guerres.
Voir également 28 juin 1919: traité de Versailles et création de la SDN
Voir également 28 juin 1919: traité de Versailles et création de la SDN